vendredi 5 février 2010

#17 – La triplication vue comme sport de combat

Les 807 passent au triphasé, on n’arrête pas le progrès, il fallait ça, sans doute, avec un bon fil de terre, pour y garder les pieds. Deux trous une pointe, ça laisse toujours rêveur, qu'on le transpose en version vaudeville, le mari, la femme, l’amant, version vapeur, le gay, le partner, le giton, ou, toujours disponible sans surcoût, en modèle de base, papa, maman, bébé. Le concept, avant d’être historique (rappelez-vous votre cours de terminale, Tripolis, Triplice et Triple Alliance) ou artistique, fut sacré : si Bosch, Raphaël ou Rubens ont rempli les églises de triptyques, médiévaux en Flandres, Renaissance en Italie, baroques en Autriche, c’est bien pour exalter, Saint Saint Saint trois fois Saint le Seigneur, un Très-haut en trois personnes. La psychanalyse a emboîté le pas, mais malheureusement calé au dernier moment : conscient, préconscient, inconscient, ça, moi et surmoi, et puis pof, plus rien. C’est tout de même con qu'avec ces deux brelans en main Freud ait calé devant une troisième topique. Il aurait gagné le tiercé au cube, ça lui aurait financé son Vienne-New-York en avion plutôt qu'en bateau, une partie de sa coke, peut-être un divan neuf de chez Roset ?

Sans compter que toute triplication est une respiration. Elle donne de l’espace, du temps et... et... (au secours les physiciens, c’est quoi le troisième truc de la liste ? l’énergie ?). Quand on s’octroie le droit au brouillon, à la variation, à la patte d’oie, on se libère. On se délie, on s'étire, on secoue son lumbago, sa dorsalgie. Et peut-être même son arthrose de nuque (je n’ai pas dit d’eunuque, n'ayant que castrat à proposer comme synonyme).

L’intérêt, la force, la puissance invincible du ternaire, c’est son impact rhétorique. « Je te l’ai dit trois fois ! » Tout galopin sait que ça va chauffer, d’instinct. Nul besoin d’aller plus loin. En deçà des trois sommations, la loi n’est pas satisfaite, il faut du libre arbitre et puis certains sont un peu sourds. Mais au delà de l’apothéose ternaire, la beigne tourne au beignet, le soufflet s’essouffle, la main prête à fesser s’affaisse, avoue le laxisme, la défection, l’impuissance. Vous imaginez les dégâts sur une psyché enfantine, en termes de destruction d'image du Père, d’une phrase comme « Arrête de faire les 400 coups, je te l’ai dit 807 fois » ?

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